Galway Harbour
Chorégraphier l'environnement socio-écologique
Figure 1 : Vue aérienne du Port de Galway (Source : Savills, Galway Harbour 2021)
La présente étude de cas porte sur un projet de design urbain au nord du 49e parallèle, impliquant des stratégies d’adaptation aux crises climatiques à l'échelle de la ville. Le projet Galway Harbour, un projet de requalification du port de la ville de Galway, a été choisi, pour ses principes de design (perméabilité, mixité, densité, marchabilité et durabilité) qui soulignent l'urgence de repenser le développement urbain en contexte climatique. Ce choix reflète la nécessité pressante de la ville de réévaluer ses méthodes de développement dans une ère où les conséquences des changements climatiques sur les milieux humains sont inévitables et imminentes.
Par l'entremise de concepts liés à la résilience et à l'adaptabilité des environnements face aux impacts des changements climatiques, notre analyse sera évaluée sous la loupe des critères de design urbain développés par Bentley et al., soit la perméabilité, la variété, la lisibilité et la robustesse. Par ailleurs, d'autres critères liés aux concepts présentés dans le cadre théorique viendront s’imbriquer parmi ces critères pour renforcer non seulement l'analyse de Bentley, mais aussi la compréhension de l'impact que doit avoir un projet de design urbain sur son environnement socio-écologique.
Figure 2 : Croquis du projet Galway 2040
(Source : Savills, Galway Harbour, 2021)
Figure 3 : Position de la ville de Galway en Irlande, (Source : par les auteurs)
Contexte
L'île d'Irlande, située à l'ouest de l'île de Grande-Bretagne dans l'océan Atlantique Nord, est divisée entre la République d'Irlande et l'Irlande du Nord (Britannica, 2023). Cette île est divisée en 32 comtés, dont 26 appartiennent à la République d'Irlande, tandis que les six autres forment l'Irlande du Nord (ibid, 2023).
Le climat irlandais évolue conformément aux tendances mondiales, exposant le pays à divers aléas climatiques (EPA, s.d). Entre 1981 et 2010, la pluviométrie annuelle nationale a augmenté de 60 mm en moyenne, soit d’environ 5% (ibid, s.d). Les projections annoncent une augmentation notable, d'environ 20%, de fortes précipitations en hiver et en automne (ibid, s.d). De plus, de 2006 à 2015, le niveau mondial de la mer a augmenté de 3,6 mm par an (ibid, s.d). Les grandes villes côtières irlandaises sont vulnérables aux marées, et une élévation significative du niveau de la mer entraînera de l'érosion côtière, des inondations et des dommages aux biens et aux infrastructures (ibid, s.d), ce qui peut causer d'importants impacts économiques, sociaux et environnementaux.
Galway
La ville de Galway est située dans l'ouest de l'Irlande, dans le comté de Galway (Galway City Council, 2016). Elle se trouve sur la rivière Corrib entre le lac Corrib et la baie de Galway (ibid, 2016). C'est la quatrième agglomération la plus peuplée de la République d'Irlande et la sixième ville la plus peuplée de l'île d'Irlande (ibid, 2016).
Le gouvernement local considère les changements climatiques comme un défi majeur (Galway City Council, 2019). En prenant des mesures proactives pour anticiper ces changements, le conseil municipal de Galway veut réduire les pertes, améliorer l'environnement et offrir des avantages communautaires (ibid, 2019). La première étape de ce processus est de développer une approche proposant des mesures adaptatives (ibid, 2019).
Galway Harbour
Galway Harbour est un port maritime, voisin du centre historique de la ville (Savills, 2021). Le port présente une vaste étendue de terres commerciales offrant un fort contraste avec la densité du centre historique (ibid, 2021). Face aux défis et risques urbains, une stratégie d'adaptation émerge, centrée sur la requalification du port de Galway (ibid, 2021).
Le cabinet d'architecture Scott Tallon Walker (STW) collabore avec la société du port de Galway pour élaborer un cadre de développement visant à transformer les terres intérieures du port existant (7,6 hectares) en un quartier à haute densité, piétonnier et à empreinte carbone nulle (STW, s.d). L'objectif est de créer une connexion entre le front de mer et le centre-ville (ibid, s.d). Cette initiative tend à répondre aux nouveaux défis urbains et guide l'adaptation du tissu urbain aux réalités climatiques changeantes (ibid, s.d).
Figure 4 : La ville de Galway et son port (Source : par les auteurs)
Morphogénèse
2023
1832
2040
2040 : Pour 2040, la ville de Galway s'est donné pour objectif de revitaliser Galway Harbour, et d'ouvrir le port ainsi que le front de mer aux générations futures (ibid, 2021). Il vise à développer le port intérieur en tant que quartier dynamique et central, offrant des espaces de travail, de vie et de loisirs de qualité (ibid, 2021). Ce projet urbain durable a pour intention de devenir une destination attractive au centre-ville, tout en incluant les meilleures pratiques de planification urbaine (ibid, 2021).
1832 : construit en 1832, Galway Harbour regroupait autrefois des activités portuaires incluant des usines à gaz, des chantiers de charbon et des entrepôts de céréales/engrais (Savills, 2021).
2023 : Aujourd’hui, ces activités initiales ont été progressivement remplacées par des développements résidentiels et commerciaux (ibid, 2021). Par exemple, l'emplacement de l'ancien entrepôt céréales/engrais est désormais occupé par un hôtel et des appartements (ibid, 2021).
Figure 5 : Galway en 1832 (Source : Savills, Galway Harbour, 2021)
Figure 6 : La ville aujourd'hui (Source : Savills, Galway Harbour, 2021)
Figure 7 : Croquis du projet de Galway 2040 (Source : Savills, Galway Harbour, 2021)
Face au défi mondial des changements climatiques, le Conseil du comté de Galway adopte diverses mesures axées sur l'atténuation (réduction des émissions) et l'adaptation (renforcement de la résilience) (Galway City Council, 2019). Le gouvernement local doit aborder divers enjeux de résilience qui sont applicables à la ville de Galway, notamment en ce qui concerne la vulnérabilité aux inondations, la croissance démographique et le bien-être humain dans le contexte quotidien, soulignant ainsi les enjeux complexes auxquels la ville est confrontée (ibid, 2019).
Enjeux
La vulnérabilité face aux inondations
Habitabilité et confort thermique
Croissance démographique
Figure 8 : Vue aérienne de Galway (Source : Savills, Galway Harbour, 2021)
La vulnérabilité aux inondations
​En raison de l'élévation du niveau de la mer et des précipitations plus intenses, Galway sera confrontée à un risque accru d'inondations côtières, fluviales et pluviales, représentant une menace majeure pour les communautés et les entreprises dans les zones vulnérables (ibid, 2019). Une Évaluation stratégique des risques d'Inondation (ESRI) a été réalisée dans le cadre de la préparation d’un plan de développement en fournissant des données sur le risque d'inondation, guidant la rédaction de politiques pour restreindre la construction dans les zones inondables (ibid, 2019). Toutefois, les changements climatiques exposent toujours les développements existants à un risque élevé d'inondation, dont le port de Galway, et ces derniers nécessitant des mesures d'adaptation. Un programme de prévention des risques d'inondation est actuellement en cours (ibid, 2019).
Figure 9 : Les risques d'inondations actuellement
(Source : The Office of Public Works, FRMP, 2018)
Figure 10 : Les berges de la Corrib
(Source : Caro, Galway City Council, 2019)
Figure 11 : Les berges de la Corrib
(Source : Caro, Galway City Council, 2019)
Habitabilité et confort thermique
L’adaptation de la ville de Galway face à l’augmentation des températures de surface, particulièrement en situation de croissance démographique, génère des défis significatifs d'aménagement et de conception urbaine influençant l’habitabilité (livability) et le confort thermique (thermal comfort) des milieux de vie (Galway City Council, 2019 ; Ronchi et al., 2020). Plus précisément, cette hausse des températures contribue à la formation d’îlot de chaleur urbain (ICU), impactant directement la santé et le bien-être des habitants (Leal et al., 2022). Un phénomène exacerbé en situation de croissance démographique, notamment par les formes et dimensions des espaces bâtis et végétalisés, la perméabilité et la conductibilité des surfaces ainsi que par les fonctions urbaines (transports, activités humaines, industries) (Nice et al., 2022). Par exemple, un ratio hauteur-largeur des bâtiments inadéquat, un effet de canyon urbain dû à un surdimensionnement de la largeur des voies de circulation ou encore une fragmentation des surfaces végétalisées occupent tous un rôle central dans la création d’ICU (Ronchi et al., 2020). Cette corrélation entre la croissance urbaine et l’augmentation de l’intensité des ICU se traduit par une étroite relation, voire une interdépendance entre les paramètres du design urbain et l’habitabilité de la ville (Santos et al., 2021). Les formes et les fonctions urbaines peuvent d’une part amplifier les impacts de l’augmentation des températures sur le confort et l’habitabilité, mais représentent également un levier permettant de renforcer l’adaptabilité climatique de la ville. Pour ainsi dire, le phénomène des ICU n’est pas spatialement dispersé sur le territoire : il résulte d’une centralisation et d’une densification plus ou moins compactes des établissements humains dans la ville (Zak et al., 2020). Or, le design urbain représente autant l’une des causes qu’il en constitue la solution. En d’autres termes, la morphologie et les aménagements qui caractérisent le projet du Galway Harbour auront des impacts directs sur l'habitabilité et le confort thermique de la ville, tant par l’atténuation des ICU que par l’optimisation de la résilience urbaine face à cette hausse des températures de surface. 
Face aux enjeux relatifs aux ICU et au confort thermique, le Conseil municipal Galway évoque dans sa Stratégie d'adaptation aux changements climatiques la nécessité d’intervenir sur la résilience thermique de la ville (Galway City Council, 2019). Dans ce contexte, le projet Galway Harbour représente une opportunité d’ériger un nouveau quartier mieux adapté à l’augmentation des températures de surface et aux ICU.
Figure 12 : Place Diagram restructuré. Origine : “Place Diagram”, Projet for Public Spaces, 2003. (Source : Source : Nouri et al., 2017)
Croissance démographique
Le projet Irlande 2040 vise à développer les villes et agglomérations régionales comme des centres urbains viables à grande échelle, offrant une alternative à la croissance continue de Dublin (Gov. of Ireland, 2019). Ces centres se veulent des moteurs de croissance pour leurs régions et les zones rurales (ibid, 2019), comme c’est le cas pour la ville de Galway. La croissance démographique prévue d’ici 2040 pour la ville de Galway et ses environs est de 40 000 à 48 000 personnes supplémentaires, soit une augmentation de 50 à 60% de la population actuelle (ibid, 2019). L’enjeu ici est d’assurer la croissance démographique dans la zone urbaine existante, tout en privilégiant un développement durable soutenu par des emplois, des logements, des services et des équipements (ibid, 2019).
Mis en commun, l'ensemble de ces enjeux dictent une question de recherche à laquelle tentera de répondre la présente analyse. Cette question s'intéresse à la résilience socio-économique, un sujet qui touche à la fois les conséquences aux changements climatique et les réalités sociales qui forme les enjeux.
Port de Galway : comment les différentes facettes d’un environnement socio-écologique peuvent-elles informer une conception sensible à l’environnement humain et naturel, et assurer la pérennité des milieux urbains ?
Figure 13 : Activités à Galway (Source : Savills, Galway Harbour, 2021)
Cadre théorique
Design microclimatique urbain
Équité urbaine
Water Sensitive urban design (WSUD)
Le cadre théorique de ce travail souhaite être le plus juste et précis possible afin d’offrir à la fois une recherche précise sur le cas du projet Galway Harbour, mais également avancer l’initiative d’un cadre d’analyse adaptable a d’autres projets climatiques. Considérant donc l’ensemble des enjeux que vivent actuellement autant les villes au nord du 49e parallèle que l’Irlande, mais plus précisément la ville de Galway, il est important de chercher à connecter ces derniers à des concepts qui ouvrent la discussion sur des stratégies envisageables pour une ville résiliente aux changements climatiques. En découle un cadre théorique qui ne se présente certainement pas comme lunette élogieuse du projet Galway Harbour, mais plutôt comme une lunette critique ouverte à l’identification et à l’analyse des qualités et défauts du projet dans le but d’informer la pratique du design urbain.
En ce sens, le cadre théorique s’est basé sur une gamme de recherches scientifiques qui se concentrent autour de différentes facettes de la résilience urbaine, qui peut être décrite comme « la capacité d'un système urbain et de tous ses réseaux socio-écologiques et sociotechniques (…), à maintenir ou à retrouver rapidement les fonctions souhaitées en cas de perturbation, à s'adapter au changement et à transformer rapidement les systèmes qui limitent la capacité d'adaptation actuelle ou future. » (Tong, 2021, traduction libre). Cette définition de la résilience urbaine, et les différentes études qui y sont associées impliquent une interdépendance des caractéristiques sociales, techniques et écologiques d’un milieu comme pilier d’adaptation aux changements climatiques (ibid, 2021), qu’on peut décrire comme environnement socio-égologique. Le but du projet, en somme, est de répondre à la question suivante :
Port de Galway : comment les différentes facettes d’un environnement socio-écologique peuvent-elles informer une conception sensible à l’environnement humain et naturel, et assurer la pérennité des milieux urbains ?
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Le projet du port de Galway présente une gamme d’intention holistique pour concevoir les aménagements urbains sous l’égide d’un environnement socio-écologique résilient. Les intentions de la ville se concentrent en effet autour de la création d’un milieu écologique qui contribue à l’amélioration des qualités sociales des espaces. La présente étude se concentre sur les intentions du projet qui peuvent avoir un impact direct sur certains enjeux spécifiques. Ces intentions, qui ont dirigé l’établissement du cadre théorique, sont les suivants :
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La réintroduction de la biodiversité
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​Par l’entremise de corridors de biodiversité et d’espace naturel, le projet cherche à attirer une gamme d’espèces indigènes et mises encore sur l’amélioration de l’espace public
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Créer un nouveau quartier urbain mixte
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​En s’axant sur une optique de la durabilité environnementale, le projet souhaite former un ensemble complet où les gens peuvent vivre, travailler et pratiquer leurs loisirs. L’écologie participe alors au domaine public.
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La gestion des inondations
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​Le projet du nouveau Port de Galway cherche à l’innovation et le design urbain agile dans une réponse qui considère la mise en place d’espace public qui profite de la présence de l’eau.
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De l’ensemble de ces intentions émane une vision globale qui vise l'adéquation de l’écologie et de l’aspect social. Le projet présente donc un cas intéressant d’environnement socio-écologique, que le cadre théorique précédemment établi nous permet d’étudier et de questionner.
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S’en est suivi une identification de concepts qui ouvraient une conversation précise autour de cette grande ligne de recherche. Plus particulièrement, celle-ci s’arrête sur les concepts de design microclimatique urbain, d’équité urbaine et de Water Sensitive Urban Design (WSUD). Le design microclimatique urbain se connecte avec l’enjeu d’ « habitabilité et confort thermique », l’équité urbaine avec la « croissance démographique » et les WSUD avec la « vulnérabilité face aux inondations ». Propres à chaque concept, quelques critères plus précis permettent alors d’appliquer le cadre théorique à l’analyse du projet.
Figure 14 : Vue aérienne de Galway (Source : Savills, Galway Harbour, 2021)
Design microclimatique urbain
Le design microclimatique urbain (microclimate [urban] design) prend racine dans une multitude d’approches visant à influencer positivement le confort thermique des habitants et à atténuer le phénomène d’îlot de chaleur urbain (ICU) (Errel et al., 2010 ; Ronchi et al., 2020 ; Lai et al., 2020 ; Kim et al., 2023). Ici, le terme microclimat renvoie aux conditions climatiques spécifiques à un quartier ou à une zone urbaine définie (Kim et Brown, 2023). Dans le cas de la ville de Galway, le microclimat étudié est celui compris à l’intérieur du secteur du port, soit le quartier faisant l’objet du projet Galway Harbour.
Le design microclimatique fait appel à une compréhension approfondie des microclimats à l’intérieur d’une ville dans leur rapport aux morphologies et aux composantes urbaines (Hou et Estoque, 2020). Autrement dit, il est ici question de guider la conception formelle des espaces urbains afin de mieux adapter la ville aux enjeux de confort thermique et d’habitabilité des milieux de vie, particulièrement dans un contexte d’augmentation des températures. Les designers du microclimat s’intéressent non seulement au rapport entre les formes bâties et la formation des ICU, mais également aux types d’aménagement et de morphologies urbaines qui favorisent ce confort thermique. Dans ce contexte, des stratégies de design visant à accroître la réactivité climatique (climatic responsiveness) des environnements urbains ont émergées et ont permis de démontrer de ce rapport liant (Erell et al., 2010 ; Nouri et al., 2017).
De manière plus pragmatique, le design microclimatique propose des principes d’aménagement favorisant une meilleure ventilation entre les bâtiments afin de minimiser l’effet de canyon urbain, provoqué par un ratio adéquat entre la largeur des voies, l’implantation au sol des bâtiments et la hauteur des façades (Santos et al., 2021). De plus, il évoque le rôle primordial du verdissement dans l’amélioration de la résilience thermique des microclimats urbains. Les services rendus par les éléments végétaux, entre autres la création d’écrans solaires naturels et la pénétration des rayons solaires dans le sol, permettent de réduire la formation des ICU (Erell et al., 2010). Ceci dit, l'aménagement arbitraire d’arbres ou d’espaces verts peut générer des effets néfastes, en contribuant notamment aux canyons urbains par un positionnement trop compact dans la trame de la ville, limitant ainsi la ventilation (Errel et al., 2010 ; Ronchi et al., 2020). Or, le design microclimatique prône une approche holistique de la conception de la ville visant à mettre les formes et les espaces urbains au service du confort et de la résilience thermique. Pour ainsi dire, l’analyse d’un projet de design urbain depuis une perspective microclimatique se traduit par un examen de la capacité de la morphologie et de l'organisation de la ville à résister aux effets de la hausse des températures de surface.
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Les travaux de Santos et al. (2021) ont notamment permis de démontrer de l’influence qu’ont la disposition, de la couverture du sol et de la hauteur des bâtiments sur les températures de surfaces à l’échelle d’un îlot. À densité équivalente, le rapport entre l'implantation au sol des bâtiments et leur hauteur, combiné à la présence d’espaces végétalisés, permettent de réguler le confort thermique des habitants.
Figure 15 : Scénarios d'analyse variés : les colonnes représentent différentes hauteurs de bâtiments et les lignes indiquent les taux d'occupation du site envisagés. Le nombre de personnes et le thermomètre permettent une évaluation qualitative initiale du nombre de personnes attribuées et de l'augmentation de la température, respectivement. (Source : Santos et al., 2021)
Par ailleurs, Erell et al. (2010) identifient de bonnes pratiques de design urbain visant à renforcer l’habitabilité des villes et réduire les inconvénients thermiques. Les stratégies incluent notamment l’aménagement d’arcades piétonnes aux premiers étages des façades afin d’offrir un écran solaire aux passants ainsi que des typologies de voies de circulation selon leur orientation et le ratio hauteur/largeur (H/W ratio) des bâtiments qui les bordent. Ronchi et al. (2020) démontrent pour leur part qu’afin de contribuer à la résilience thermique de la ville, les espaces verts doivent être organisés de manière à former un parcours continu. Autrement dit, un verdissement structuré et connecté dans la ville, et non fragmenté, sont synonymes d’une meilleure atténuation des ICU et donc d'un confort thermique accru. De ce fait, la liaison directe entre les espaces verts offre une meilleure capacité à lutter contre la hausse des températures de surface en opposition à une dispersion morcelée dans la ville.
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Concernant le cas plus précis de la ville de Galway et du projet Galway Harbour, les principes présents dans la littérature traitant du design microclimatique permettront de poser un regard critique sur les aménagements et les décisions prises par les designers urbains. Plus précisément, il sera question d'analyser la capacité du projet à favoriser l’habitabilité et le confort thermique des individus par a) la morphologie du quartier, b) les ratios des dimensions des bâtiments et de voies de circulation ainsi que c) l’organisation spatiale des espaces verts, en comparaison aux stratégies de design microclimatique précédemment évoquées. De plus, nous étudierons la robustesse des aménagements proposés, leur résistance face à la hausse des températures de surface (Huang et al., 2023), de même que la présence d’une pluralité d’options d'équipements et de stimulations thermiques (Nouri et al., 2017) offertes dans l’espace public (espace végétalisé et espace bâti ; exposition au soleil et ombrage ; place intime et grande place ; ressources en eau et canopée).
Figure 16 : Schéma résumé du Design Microclimatique Urbain (Source : par les auteurs)
Équité urbaine
L’équité urbaine est un concept qui définit la possibilité pour tous d’habiter dignement la ville et de profiter des différentes composantes qu’elle offre. Il s’agit d’un objectif à poursuivre de manière continue, afin de permettre la participation collective aux différentes sphères de la vie publique, qu’elles sont politiques, sociales, culturelles, économiques, etc. (Vivre en ville, 2015). À l’échelle de la ville, l’équité urbaine doit, en plus des points précédemment abordés, permettre une distribution des chances, de manière à garantir un accès juste et équitable aux différents services essentiels (éducation, soins de santé, logements, nourriture, etc.) (Société Française des Urbanistes, 2014). L’équité urbaine est un « cadre conceptuel à même de guider les décisions en faveur de l’amélioration des conditions de vie en ville pour tous » (ONU Habitat, cité dans PFVT 2014) qui tend à être intégré par la communauté internationale et reconnue comme fondement du développement urbain durable (PFVT, 2014).
Les principes d'équité urbaine se résument en deux concepts interdépendants : l'universalité et l'inclusion (Vivre en ville, 2015). L'universalité implique que les politiques, règlements et aménagements publics doivent bénéficier à l'ensemble de la population dans l'intérêt commun, plutôt que de servir des intérêts individuels ou de groupes spécifiques. Quant à l'inclusion, elle vise principalement à garantir que les groupes vulnérables ou minoritaires ne soient pas exclus de l'espace public. Les principes de l’équité urbaine ont pour obstacle divers phénomènes de redistribution de la population, notamment liés à l’embourgeoisement, à l’homogénéité des types de logements et à la dépendance à l’automobile.
En ce qui concerne l’aménagement urbain, plusieurs critères permettent d’améliorer l’équité urbaine. Les projets de requalification urbaine dans les secteurs dont une grande partie de la population peut profiter sont à prioriser. Le droit à la mobilité est également un aspect de premier plan dans toute stratégie visant à permettre au plus grand nombre de profiter des installations et avantages urbains, et implique une hiérarchisation des moyens de transport (Vivre en ville, 2015).
L’un des aspects primordiaux de l’équité urbaine est la mixité sociale (Vivre en ville, 2015), qui peut se préciser en deux grandes catégories, soit la mixité de types d’unités, et la mixité d’usage ou d’activités (Talen, 2007). La mixité de types de logements peut être réalisée à différentes échelles concernant la ville, le quartier et le bâtiment. La mixité d’usage consiste en la variété de fonctions disponibles dans un secteur en plus de la fonction résidentielle, et contribue directement à la diversité sociale, un facteur important de résilience (Talen, 2007). La mixité d’unités et d’usages mène à plusieurs avantages, qu’ils soient sociaux, écologiques ou économiques (vivre en ville, 2013).
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Historiquement, la ségrégation sociale et les problèmes d’équité urbaine affectent l’habileté de certains individus et groupes à faire face aux conséquences des changements climatiques. Les personnes à bas revenus, les femmes, les personnes âgées et les minorités ethniques sont généralement plus vulnérables aux changements climatiques. (Reckien, D. et al, 2018). La localisation physique et le degré d’exposition, l’accès aux infrastructures critiques, les ressources disponibles pour s’adapter et la gouvernance institutionnelle sont quatre facteurs principaux qui régissent la capacité des individus et des groupes à faire face aux conséquences des changements climatiques (ibid, 2018). La dimension sociale de la résilience est donc cruciale dans toute stratégie d’adaptation aux changements climatiques, et l’équité et la justice environnementale devrait être des objectifs à long terme des politiques urbaines en matière de climat.
Figure 17 : Schéma résumé de l'Équité urbaine (Source : par les auteurs)
Water Sensitive Urban Design (WSUD)
Dans le cadre de ce travail, le concept de Water Sensitive Urban Design (WSUD) aussi connu sous le nom de Low Impact Development au Canada est étudié comme une réponse à l’enjeu de vulnérabilité face aux inondations.
Le WSUD fait référence à une approche sensible aux ressources en eaux dans la planification urbaine pour assurer la durabilité à long terme autant pour la ressource aquatique que pour les générations à venir (Donofrio et al., 2017). Plus particulièrement, il vise à considérer davantage les cycles de l’eau urbains comme les eaux pluviales, l’eau potable et les eaux usées (Donofrio et al., 2017). Le WSUD considère donc à la fois les processus hydrologiques et l’écologie naturels grâce à la mise en place de stratégie urbaine qui minimise l’impact négatif du développement urbain sur l’environnement (Ulil Amor Bin Zaman, K.M. et al., 2022).
La mise en place de stratégies urbaines de WSUD se présente comme une façon habile d’assurer une résilience et une prévention face aux inondations, mais aussi comme une façon d’améliorer la qualité de l’eau (Donofrio et al., 2017). Sans s’y arrêter, le concept propose une gamme de stratégie efficace comme les bassins de rétention, les zones humides, les toits verts, les bandes plantées et les infrastructures vertes qui retiennent plus aisément l’eau (Ulil Amor Bin Zaman, K.M. et al., 2022).
Plusieurs principes dictent l’approche des WSUD. Dans le cadre de ce travail, l’intérêt est porté plus particulièrement sur leur capacité à protéger les systèmes naturels, à intégrer le traitement de l’eau de pluie directement à partir du design urbain, à créer des paysages urbains de qualité, à assurer une résilience aux inondations. Succinctement, à travers les stratégies de prévention aux inondations, les WSUD offrent un cadre complet à la résilience urbaine tout en proposant l’amélioration esthétique des villes. Enfin, à travers l’adéquation des considérations autant sociales qu’écologiques, le concept de WSUD permet d’ouvrir l’analyse sur une réelle réponse à l’environnement socio-écologique.
Figure 18 : Réinterprétation de la Figure 1 : Principes Clés du WSUD (Donofrio et al., 2017) et Figure 8 : Perception des WSUD (Ulil Amor Bin Zaman, K. M., 2022) (Source : par les auteurs)
De ces principes découlent quelques éléments importants qui teinteront l’analyse du projet du Port de Galway conjointement à certains critères de Bentley qui peuvent se renforcer par une étude du WSUD. Le schéma ci-dessus indique les éléments qui serviront à mesurer les résultats qui émaneront de l’analyse. Pour concentrer la recherche, les éléments principaux sont :
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Considération des cycles de l’eau urbaine
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​Est-ce que le projet met en place des stratégies de WSUD?
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Protection de la ressource
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​Est-ce que le projet met en place des mesures de protection de la ressource?
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L’intégration d’aménagement esthétique au design urbain
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​Est-ce que le projet profite de la présence de l’eau et crée des espaces esthétiquement attrayants?
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De ces éléments émane la capacité de WSUD à former un cadre tenace à la menace climatique. Succinctement, il devient évident que le concept de WSUD ouvre la réflexion sur l’apport d’un projet tel que celui de Galway Harbour qui s’implante dans une zone hautement vulnérable aux inondations. Les critères établis au courant de ce cadre théorique qui s’appliquent au WSUD comme la résistance et la flexibilité deviennent donc des outils d’analyse efficace pour porter un regard sur les stratégies mises en place par le projet.
Les concepts d’équité urbaine, de design microclimatique urbain et de Water Sensitive Urban Design (WSUD) représentent des complémentaires pour aborder les défis liés aux changements climatiques dans un contexte urbain, en particulier pour le projet du Port de Galway. À travers les diverses méthodes et conditions relatives aux concepts abordés, plusieurs liens peuvent être faits avec les critères de conception d’environnements sensibles de Bentley et al. En raison de l’état préliminaire de conception du projet abordé, quatre critères abordant les principes de bases de la conception urbaine sensible ont été sélectionnés pour réaliser l’étude de cas en fonction du niveau de détail disponible. Ces critères sont la perméabilité, la variété, la lisibilité et la robustesse.
En somme, les cirières qui intéresseront le restant du travail et qui émanent des concepts nommés ci-haut sont :
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La résistance;
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La flexibilité et;
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La pluralité d’options
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L’universalité
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La mixité
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L’inclusion
Le concept du design urbain microclimatique, axé sur la compréhension des microclimats locaux et des composantes urbaines, fait appel à diverses notions relatives aux matériaux et à la typologie des bâtiments et infrastructures publiques. Ce faisant, plusieurs liens peuvent être tracés entre le critère de robustesse et ses critères de pluralité d’options et de résistance, qui sont fortement influencés par les caractéristiques matérielles et fonctionnelles des espaces publics.
La notion d’équité urbaine, par ses critères d’universalité, d’inclusion et de mixité, repose fortement sur le principe de mixité sociale et d’accès aux services et opportunités de l’espace urbain. Les critères de perméabilité et de variété sont donc essentiels à la compréhension et à la conception de la ville équitable.
Le Water Sensitive Urban Design (WSUD) se positionne comme une réponse intégrée aux défis liés à l'eau en milieu urbain, en mettant l'accent sur la gestion durable des ressources hydriques. Présentes dans l’espace public, les caractéristiques physiques des solutions de WSUD ont l’opportunité d’être intégrées au cadre bâti et de contribuer à la lisibilité de la ville grâce à ses critères de résistance et de flexibilité.
C’est dans la globalité de ce cadre théorique qu’on y retrouve toute la pertinence de porter un regard holistique sur l’environnement socio-écologique. On y observe alors toute l’importance d’utiliser l’écologie élément fondatrice d’un cadre social urbain. C’est donc réellement à travers ces deux aspects que les villes climatiques qui se veulent résilientes aux impacts des changements climatiques doivent porter leur regard.
En se concentrant sur ces critères pour renforcer l’analyse des critères de Bentley, l’analyse qui suit permet de vérifier si les prétentions du nouveau port de Galway répondent adéquatement à ce que devrait être le design urbain résilient.
Le schéma de concept ci-dessous résume la portée générale du cadre théorique :
Figure 19 : Schéma de concepts (Source : par les auteurs)
Dans son ouvrage Responsive Environnement : A Manual for Designers Bentley établie une gamme de critère essentiel à la conception des villes. Dans le cadre de ce travail de recherche, ceux qui nous intéressent sont la perméabilité, la variété, la lisibilité et la robustesse. Complémentaires à l’environnement socio-écologique, les critères de Bentley concrétisent davantage la conception d’un design urbain adapté à l’expérience de l’usager reliant alors plus efficacement les aspects écologiques, sociaux et expérientiels de la ville.
Galway Harbour
Perméabilité
Variété
Lisibilité
Robustesse
Figure 20 : Vue aérienne du port de Galway (Source : Savills, Galway Harbour, 2021)
La vision 2040
Figure 21 : Vue aérienne du projet de Galway Harbour 2040 (Source : Savills, Galway Harbour, 2021)
Perméabilité
La perméabilité est la qualité d’un environnement qui permet plusieurs accès différents aux espaces qui le composent, et donc donne aux utilisateurs un choix et une richesse d’accès. La perméabilité est inversement proportionnelle à la dimension des îlots, et peut être physique ou visuelle. Une hiérarchie trop stricte des voies d’accès et une ségrégation des catégories d’utilisation de l’espace urbain peuvent nuire à la perméabilité.
La perméabilité concerne les espaces privés et publics. Pour permettre un accès visuel et physique entre les deux types d’espaces, tout en permettant une gradation du niveau d’intimité dans les logements, un développement en périmètre de bloc est à prioriser. Ce type de conception permet une interface physique et visuel directe entre l’accès aux espaces privés et l’espace public, enrichissant ces derniers. Les activités privées se retrouvent inversement à l’abri du regard et du contact de l’espace public.
Figure 22 : Schéma résumé de la perméabilité (Source : par les auteurs)
La perméabilité est l’un des objectifs au cœur du projet de développement pour le port de Galway. Les administrateurs du projet veulent faire de ce nouveau pôle urbain un endroit plaisant et confortable pour les citoyens, un endroit où les déplacements actifs sont au mis en valeur, ou l’organisation de l’espace public donne un « sens de l’endroit ». Pour se faire, le réseau viaire de ce nouveau quartier est composé de parcours mère, partagé par les automobilistes, les cyclistes et les piétons, ainsi que de parcours « secondaires », dédiés aux formes actives de déplacement uniquement. Finalement, des parcours piétons spécifiques sont prévus pour donner accès aux secteurs résidentiels. À des fins d’augmenter la perméabilité, le réseau viaire planifie des voies d’accès en lien avec le réseau existant, qui donnent à l’ensemble des orientations naturelles et des points de repère, de manière à faciliter les options de déplacement des utilisateurs. Sur la carte ci-contre, les tracés plus épais représentent les parcours partagés avec l’automobile, en lien avec le réseau routier de Galway.
Comme mentionné dans la description de la perméabilité selon Bentley, cette dernière peut être physique et visuelle, et doit s’inscrire, lorsque possible, dans la trame existante afin de renforcer les connexions et les options de parcours. Dans le cas du projet du port de Galway, le contexte existant autour du secteur d’intervention et la forme particulière de ce secteur défini par les activités portuaires passées laissent peu de place aux liens entre les parcours existants et ceux planifiés. Les possibilités de lien avec les alentours dépendent principalement de requalifications potentielles d’espaces industriels et de stationnement autour de la zone portuaire. Les flèches rouges représentent ces possibilités, bien qu’elles ne fassent pas partie des plans présentés par la ville de Galway.
La hiérarchisation des voies est prometteuse dans l’optique de prioriser les parcours actifs, et plusieurs ouvertures sont prévues vers le bassin central du port, multipliant les options de déplacement. Cependant, le manque de rigueur dans la trame proposée et la forme des bâtiments génère des variations non négligeables dans la largeur des rues, sans être dicté par une logique précise. Le positionnement des bâtiments proposés génère aussi un manque de perméabilité visuelle à certains endroits, ce qui peut nuire aux options de déplacement (on ne peut pas utiliser un chemin si on ne sait pas qu’il mène à notre destination).
Bien qu’essentiellement multifonctionnel, le développement proposé comprend néanmoins un secteur résidentiel précis, qui se traduit par un changement dans la perméabilité du réseau viaire. Ce secteur à l’est de la zone, identifié par une hachure diagonale sur la carte, est caractérisé par des bâtiments résidentiels implantés perpendiculairement. Une certaine ambiguïté émerge de cette implantation quant à l’aspect plus ou moins privé des rues et des accès. Il semble difficile pour un utilisateur de déterminer si les accès à ces bâtiments sont restreints ou non. Cette implantation cause également un problème dans l’interface physique et visuel entre les espaces privés et publics. Les bâtiments implantés perpendiculairement aux voies principales n’ont effectivement pas de façades avant ni arrière, et la hiérarchisation des espaces intérieurs en est grandement compliquée.
De manière générale, le projet du port de Galway est caractérisé par une grande perméabilité, définie par une multitude d’options de déplacement et des accès multiples aux points d’intérêt. Cependant, la perméabilité visuelle est compromise à plusieurs endroits, notamment en raison de la forme des bâtiments qui bloquent la vue et qui imposent des bifurcations au réseau. Par ailleurs, le secteur qui est identifié sur la carte pourrait être nettement amélioré. À cet endroit, la surface d’intervention est grande et de forme relativement rectangulaire ; cet endroit pourrait donc être utilisé pour implanter un réseau viaire plus régulier et donc plus perméable. Cela aurait également pour effet de permettre un cadre bâti en îlots qui respecte les principes du « développement au périmètre des îlots », qui génère une hiérarchisation logique entre les espaces publics et privés.
La perméabilité de ce projet, et spécifiquement l’emphase mise sur les déplacements actifs, est l’un des critères de l’équité urbaine. Les multiples possibilités de déplacement font en sorte que les espaces sont accessibles par le plus grand nombre possible, et ne limite pas les citoyens ne possédant pas de véhicules.
Figure 23 : La perméabilité du projet Galway Harbour 2040 (Source : par les auteurs
Variété
La variété est la qualité d’un environnement qui offre une multitude de choix et d’expériences aux usagés, et est complémentaire à la perméabilité. La variété d’usage permet d’attirer différentes personnes, à différents endroits, à différents moments, de manière à ce que les espaces publics ne se trouvent pas inoccupés à certains moments de la journée.  En ce sens, la variété d’usage génère une variété globale.  Les espaces monofonctionnels, même s’ils sont prévus dans une optique d’efficacité, sont des freins à la variété.   
La variété est fortement influencée par la mobilité ; elle doit profiter à l’ensemble de la population, indépendamment de leur moyen de transport et de leurs revenus.  La faisabilité d’un projet dépend, entre autres choses, de la fonctionnalité de la mixité d’usage.  La variété des fonctions doit donc être considérée en tenant compte des usages qui sont compatibles, qui se supportent mutuellement, et qui attirent des utilisateurs à différents moments.  Il ne faut cependant pas considérer incompatibles des usages simplement par habitude ou par apparence.   
La variété d’usages et de types d’espaces est une priorité dans la conception du développement du port de Galway.  L’espace des quais entourant le port sera transformé en espace événementiel multifonctionnel, et une multitude de commerces, restaurants et boutiques seront localisés dans cette ceinture afin d’attirer les citoyens et leur offrir une expérience agréable.  Les administrateurs du projet mettent beaucoup d’emphase sur la mixité d’usages des différents bâtiments, incluant une occupation commerciale des édifices existants sur Dock road, qui peuvent être facilement rénovés et convertis lorsque nécessaire.  Le projet du port de Galway est en développement, et les documents conceptuels disponibles stipulent que l’utilisation des bâtiments projetée représente une intention, mais que l’utilisation réelle pourrait varier.  Le projet comporte également un volet environnemental, qui vise à restituer une partie du territoire à l’étude à l’environnement naturel pour augmenter la biodiversité du secteur et générer une variété d’espaces publics.  L’aménagement des corridors fluviaux qui longent le port pour favoriser un retour d’espèces indigènes fait également partie du projet.   
Les principes de la variété impliquent une variété d’usage et de types de logement dans le contexte résidentiel.  De plus, dans le but d’attirer différentes personnes, à différents moments et pour différentes raisons, la variété d’usage et d’expériences doit être établie à différentes échelles, soit celle du bâtiment, du quartier et de la ville.  On doit tenter d’éviter la ségrégation de certaines fonctions à trop grande échelle, ce qui nuit à la variété, mais aussi à l’accessibilité de certains secteurs, souvent en raison de la mobilité associée à cette ségrégation. 
Le projet du port de Galway présente une diversité de fonction intéressante.  Plusieurs bâtiments sont mixtes, contenant à la fois des commerces et des logements, ou des commerces et des bureaux.  Les stratégies de mobilité projetées permettent également à une majorité de citoyens d’avoir accès à cette mobilité.  On note cependant certaines concentrations à certains endroits.  Des bâtiments sont dédiés à des bars et restaurants, ce qui peut potentiellement générer des moments de la journée où l’activité est drastiquement réduite.  Le secteur résidentiel mentionné plus tôt présente également une forme de ségrégation.  Chaque bâtiment ne peut évidemment pas être mixte, mais la typologie des bâtiments résidentiels et la morphologie des rues qui les servent rendent difficilement modifiable et requalifiable ce secteur dans le futur.  Les documents disponibles sont très vagues quant à la nature des unités de logement offertes, à savoir s’ils sont locatifs ou destinés à l’achat, et quelles dimensions de logement sont offertes.  Dans le but de garantir l’accès au logement à une grande variété de ménages, une mixité de typologie de logement et des modes de tenure devrait être offerte.  Le principe de variété comporte également une dimension relative à la forme du cadre bâti, et à son aspect esthétique.  Bien que les images disponibles du projet soient préliminaires et vouées à changer, on peut remarquer une forte homogénéité des styles architecturaux et des volumétries, ce qui représente un manque de variété. 
Ces deux principes de mixité, soit celle du type d’usage et du type d’unités de logement offertes, sont à la base du concept d’équité urbaine.  En ce sens, le projet du port de Galway y contribue.  On peut également noter que le secteur même du projet, près du centre-ville et à forte proximité de pôles intermodaux importants, comme la gare de Galway, contribue directement à la notion d’équité.  L’accès à l’eau, tel que le décrit Pierre Larochelle, est une ressource rare qu’il faut protéger et, dans un souci d’équité, rendre disponible au public (Larochelle, 2009).  Les efforts de valorisation de la zone côtière de la ville dans l’optique d’en faire un bien commun sont donc très pertinents et s’inscrivent dans l’idée d’équité urbaine.  Cependant, le projet comporte certains édifices résidentiels à logement de grande hauteur très près de l’eau.  Ce type de projet immobilier est souvent caractérisé par des prix de logement très élevés, qui pourraient mener à des problèmes d’embourgeoisement, et donc à une perte de mixité sociale.  La perte de mixité sociale, et donc d’équité urbaine, peut générer une ségrégation dans les capacités de résistance et d’adaptation aux conséquences des changements climatiques. Bien que les stratégies énumérées précédemment tendent à créer un environnement socio-écologique diversifié, et donc résilient, cette résilience est tributaire de l’équité urbaine du projet, et de la ville en général. Étant donné l’information sommaire disponible quant aux caractéristiques d’accessibilité au logement du projet de Galway, il est difficile d’établir concrètement si le projet s’inscrit dans une démarche couvrant l’ensemble des critères de l’équité urbaine. Les stratégies de design urbain qui caractérise les principes d’aménagement du projet vont certainement dans la bonne direction ; il en revient donc aux différents acteurs locaux et régionaux de faire de l’équité urbaine un véritable pilier de du projet.
Figure 24 : Schéma résumé de la variété (Source : par les auteurs)
Figure 25 : La variété du projet Galway Harbour 2040 (Source : par les auteurs)
Lisibilité
La lisibilité est la qualité d’un environnement à se comprendre aisément et dans lequel il est ainsi facile de s’orienter. Elle peut être physique, ou concerner les « patterns » d’activité. Bien que ces deux niveaux de lisibilité puissent être évalués séparément, le potentiel d’un environnement est davantage enrichi lorsqu’ils sont complémentaires. La ségrégation des moyens de transport, spécifiquement entre le déplacement automobile et pédestre, a pour conséquence de réduire la lisibilité des parcours piétons, relayés aux espaces de second plan.
Selon Kevin Lynch, la lisibilité peut être accentuée par la configuration de cinq types d’éléments : les nœuds, les périmètres, les voies, les districts et les points de repère. Dans la présente étude, les nœuds et les voies représentent des potentiels de lisibilité intéressants. Les intersections d’une plus grande importance, en raison de la fonctionnalité des voies qui se croisent et de l’usage des bâtiments adjacents, deviennent des nœuds qui peuvent être mis en valeur par leur aménagement. La lisibilité des voies peut être accrue par leur enceinte, soit par la présence et le niveau de continuité des bâtiments en bordure, qui confèrent aux voies un caractère unique. La lisibilité doit finalement tenir compte de l’environnement et des points de repère existants, afin qu’ils puissent être intégrés au projet urbain.
Figure 26 : Schéma résumé de la lisibilité (Source : par les auteurs)
La lisibilité actuelle
Lorsqu’il soutient l’idée de la lisibilité, Bentley met l’emphase sur la perte du caractère lisible des paysages urbains contemporain. Cette réalité est toute aussi vraie pour le Port de Galway dont le design amplifie la confusion et limite la lisibilité. En effet, la zone est hostile et caractérisée par de grands stationnements où les périmètres s’effacent à travers le peu de bâtiment qui sont en mesure de se démarquer. En outre, les voies et les nœuds sont presque inexistants considérant leur manque de singularité. En ce sens, le projet du nouveau port de Galway ne modifie pas particulièrement l’image du quartier qui forme la lisibilité actuelle du site. Effectivement, il travaille plutôt avec l’existant dans un esprit d’amélioration de la lisibilité.
Figure 27 : Les limites du port de Galway aujourd'hui (Source : Google Earth, 2023)
La lisbilité du projet Galway Harbour 2040
Voies
Élément important de la lisibilité, le projet du nouveau Port de Galway travail habillement avec les voies existantes dans le but de les renforcer. Ce renforcement passe notamment par une hiérarchisation et une classification juste des parcours. Considérant l’avancement actuel du projet, il est difficile de conclure sur la nature exacte privée ou publique des voies. Néanmoins on y distingue dès lors des voies plus ouvertes et plus grandes qui communiquent certainement du caractère davantage public de certains secteurs. Les voies plus petites qui semblent alors être au dos des bâtiments partagent davantage un sentiment d’espace privé ou du moins semi-public. Toute la richesse de la distinction des voies n’émane cependant pas uniquement de la hiérarchisation morphologique de celles-ci. En effet, celles qui bordent le bassin d’eau du port se démarquent plus aisément du reste parce qu’elles ont une identité forte grâce à leur taille et à la présence de l’eau.
En d’autres mots, le projet compose avec deux modèles différents de voies. L’un, à l’ouest du plan (2), plus fermé, profite à la fois des qualités de l’existant et d’un caractère moins perméable pour guider l’œil et le mouvement des usagers. L’autre, à l’est du plan (1), entourant le bassin, agit comme endroit ouvert qui se caractérise et se distingue d’autres voies du secteur surtout grâce aux éléments qui la ponctuent créant facilement un design lisible.
Figure 28 : Les voies du projet de Galway Harbour 2040 (Source : par les auteurs)
Noeuds
Sans nécessairement renforcer les nœuds existants sur le site, le nouveau quartier urbain permet la création de tout nouveau pôle qui agit comme nœuds. La connexion s’effectue par le biais de voies publiques d’importance amplifiant dès lors la force des nœuds vers chaque centralité. Autour de ces nodules se dispose alors une mixité de programme qui profite au caractère public de l’espace. Effectivement, on y retrouve des bâtiments commerciaux, résidentiels, culturels et en grande majorité, des bâtiments à programme mixte. En ce sens, dans chaque nœud se constitue une identité propre à lui selon son rapport aux voies et à la variété qui le forme. Le plus important est alors celui à l’est du plan (3) puisqu’il est formé de quatre voies d’importance et communique presque directement avec plusieurs programmes pertinents pour le domaine public. Ces « éléments » du milieu bâti aide le projet à créer des marqueurs importants qui deviennent alors source de lisibilité et d’orientation pour les gens du quartier.
Figure 29 : Les noeuds du projet de Galway Harbour 2040 (Source fichier de base : Galway Harbour, 2021 ; dessin par les auteurs)
Repères
Par l’entremise de grande tour d’habitation, le projet du nouveau port de Galway tente de former d’importants points de repère dans le paysage urbain de la ville. Amplifié par leur présence aux abords du bassin, ces éléments presque monolithiques sont facilement visibles autant de près que de loin agissant ainsi comme des appels dans le tissu du nouveau du quartier. Presque au centre du bassin, on y trouve aussi un de plus petit gabarit qui, malgré sa petite hauteur, ne deviendra certainement point de repère dans le quartier à cause de son emplacement. En effet, puisqu’il ne se situe pas à une jonction de voies, il se positionne habilement à la vue de tous se projetant même vers l’avant pour marquer davantage le repère. L’eau agit aussi comme repère et marqueur du site.
Figure 30 : Les repères de Galway Harbour 2040 (Source fichier de base : Savills, Galway Harbour, 2021 ; dessin par les auteurs)
Limites
Considérant l’avancement du projet, il peut être difficile d’analyser si la conception du design urbain prend en compte la mise en place de limites. On peut néanmoins interpréter que ce critère, important à la lisibilité, semble avoir été quelque peu outrepassé si l’on s’arrête à l’analyse morphologique des bâtiments. Effectivement, ce manque de linéarité rend quelque peu ambiguë la lecture des limites. Cependant, en se transposant à l’échelle humaine, par l’intermédiaire de rangées d’arbres aux abords des voies, il est possible de comprendre la volonté des concepteurs à offrir un espace clôturé de végétations qui agit ainsi comme limite indépendamment des bâtiments. Au bord du bassin qui agit aussi comme limite, conjointement aux façades linéaires des bâtiments existants, certains éléments qui ponctuent la voie agissent tout autant comme enceinte.
Figure 31 : Les limites du projet de Galway Harbour 2040 (Source : par les auteurs)
Un projet lisible?
L’eau agit présentement comme caractère lisible du projet, elle semble donc avoir été considérée dans le futur projet comme élément amplificateur du critère. Cette proximité avec l’élément à la base de la vulnérabilité aux inondations ouvre le dialogue avec le concept de WSUD. Le critère de flexibilité et de résistance, proche au concept comme discuté plus tôt, est donc complémentaire à la lisibilité pour analyser la réussite ou non du projet en ce qui a trait à ce critère.
Il est difficile de réellement venir à la conclusion que le projet du Galway Harbour travaille efficacement avec les WSUD. À travers les documents explicatifs du projet, on y fait mention à plusieurs reprises de stratégies de design urbain esthétique et efficace qui participe à la fois à la protection de la ressource pour améliorer la qualité de l’eau, mais aussi à la considération des eaux pluviales. Chose certaine, les documents graphiques montrent peu cesdites stratégies, se concentrant davantage sur la vulgarisation de l’information. Il est cependant possible d’établir des interprétations à partir des quelques images. On y voit notamment la mise en place de toit vert, technique qui fait partie du WSUD, et on comprend que la mise en place de cette stratégie agit autant comme caractère flexible, grâce à son esthétisme et à sa lisibilité dans l’établissement de repères. Cette stratégie semble toutefois rester à la surface du concept. La lisibilité tombe donc victime du manque de considération du WSUD dans la conception du projet.
Le Water Sensitive Urban Design présente en effet une gamme de stratégie qui pourrait renforcer la lisibilité du projet et réellement profiter des qualités propres au critère de lisibilité et de flexibilité tout en offrant la résilience aux inondations que souhaite atteindre le projet. Parmi tant d’autres, l’utilisation de terrain de sports ou de parc public qui se transforme en bassins de rétentions lors de grande pluie ou d’inondations offrirait au projet un caractère lisible et mémorable qui agirait comme espace flexible au traitement des eaux. Agissant comme nouveaux nœuds par leur capacité d’attraction, ces espaces amélioreraient réellement la lisibilité actuelle du site.
Dans l’établissement de limites, de remplacer quelques arbres par des bandes plantées permettrait au projet de clarifier l'identité de certaines voies et ainsi de hiérarchiser davantage le réseau dans l’optique d’améliorer l’orientation à travers le projet. Cette technique représente aussi une stratégie à la fois flexible et résistante par sa capacité à traiter l’eau de pluie, c’est-à-dire à protéger la ressource et les cycles hydrologiques, et à agir comme élément esthétique dans l’espace public. Sans trop impacter les limites, cette stratégie pourrait aussi aider à réduire l’apport des arbres dans l’effet de clôture pour donner au bâtiment le caractère plus linéaire nécessaire à la conception d’un paysage urbain lisible.
Ultimement, il est possible d’interpréter que le projet manque de stratégie de WSUD qui pourrait réellement participer à l’ajout de nœuds, de repères, des limites et d’une identité pour les voies qui aiderait ultimement à créer un nouveau quartier lisible. Ce manque de considération du WSUD et des critères flexible et résistant qui en émane fait de Galway Harbour 2040 un projet plus ou moins lisible s’accrochant plutôt en surface aux éléments de Lynch. L’intégration de stratégies de gestion d’inondation comme réponse holistique qui inclut la lisibilité aurait amélioré cette connexion aux éléments de la lisibilité.
Figure 32 : Exemple de jardin de pluie (Source : Beza, B., 2018)
Robustesse
La robustesse est la qualité d’un espace à être utilisé de plusieurs manières différentes, et donc offrir plus de choix aux usagers. Elle peut être de petite ou de grande échelle, et donc concerner les bâtiments et les espaces publics. Pour les bâtiments, la robustesse pertinente pour l’étude actuelle consiste en la qualité du bâti de pouvoir évoluer et accueillir différents usages.
Pour les espaces publics, la robustesse concerne principalement leur périmètre. Dans une conception robuste, l’interface entre la rue et le bâti permet aux activités du bâtiment de déborder dans l’espace public. En ce sens, la cohabitation entre les déplacements automobiles et pédestres est un élément critique à considérer dans la conception de ces lieux. La conception d’espaces publics robustes devrait pouvoir permettre la tenue d’activités publiques variées, sans qu’elles se posent de contraintes mutuelles. Finalement, les microclimats permettent d’augmenter la variété d’activités possibles, et donc la robustesse.
Figure 33 : Schéma résumé de la robustesse (Source : par les auteurs)
La robustesse et pluralité d'options dans le projet de Galway Harbour
La proposition de réaménagement du Port de Galway présente un traitement de l’espace public global s’insérant dans ce que Bentley qualifierait de robuste à certains égards. D’abord, cette robustesse se traduit par un dialogue fluide entre les bâtiments, les voies de circulation et les places publiques. Concrètement, la transition entre les voies et les espaces publics s'opèrent de manière à accueillir et à s’ouvrir par une entrée accessible. Il n’y a donc de barrière symbolique ni physique limitant la consommation des espaces publics. De plus, la présence d’arcades piétonnes ouvertes marquant le passage entre l’espace public et le bâtiment ne constitue pas uniquement une démonstration supplémentaire de la robustesse de l’aménagement, mais également la présence d’une stratégie de bonification du confort thermique formulée par Erell et al. (2010), renforçant ainsi la résistance du secteur face à la hausse des températures de surface (Huang et al., 2023).
Figure 34 : Galway Harbour 2040 - Exemple d'une arcade piétonne (Source : Scott Tallon Walker Architects, 2023)
Par ailleurs, la robustesse de la proposition se manifeste sous la forme d’espaces publics polyvalents, au sens où leur usage n’est pas imposé, mais davantage soumis à l’appropriation des individus. Autrement dit, en ignorant la place publique monofonctionnelle, le projet Galway Harbour offre des espaces dynamiques et malléables, puisqu’ils peuvent accueillir une vaste gamme d’usages différents.
Ceci étant dit, le projet semble miser sur une place publique généralisée, au sens où elle s’étend dans le secteur tel une mer homogène, ponctuée de bâtiments et de rues, sans organisation claire. Rien n’est contraignant, certes, mais par le fait même rien n’est particulier et évocateur. Dans ce contexte, il devient difficile de s’approprier un lieu en l’absence de son sens explicite. Par ailleurs, les espaces intimes, de plus petites tailles et clairement délimités, sont délaissés au profit des places monumentales. Or, les options offertes en matière de typologie des places publiques sont faibles. Il existe d’une part des grands espaces verts vierges, et d’une autre part des parcours piétons bétonisés. Pour ainsi dire, les espaces publics sont robustes puisqu’ils n’excluent à toute fin pratique aucun usage, mais ils ne proposent toutefois que très peu d’options aux individus. Tel que nous l’avons mentionné plus haut, une faible pluralité d'options est synonyme d’une faible capacité à assurer le confort thermique des habitants (Nouri et al., 2017). Or, bien que robustes selon la définition de Bentley, il ne contribue qu’à faible mesure à la résilience du Port de Galway face aux pressions climatiques.
Figure 35 : Caractéristiques pour une place publique résiliente. (Source : Nouri et al., 2017. )
Résistance
Le projet Galway Harbour mise sur un verdissement marqué du tissu urbain. Par la présence d’éléments naturels répandus sur l'ensemble du secteur, le projet favorise l'absorption de l’énergie solaire plutôt que la réflexion et la séquestration à la surface due à la présence de matériaux perméables, limitant ainsi la formation des ICU. Le positionnement d’arbre le long des voies offre aux piétons un écran solaire naturel, conformément aux principes formulés par Erell et al. (2010). En revanche, le projet mis fortement sur les toitures des bâtiments pour assurer le verdissement du quartier. Or, les espaces verts sont fragmentés, ne permettant pas d’optimiser le potentiel résistance climatique du projet, selon les conclusions de Ronchi et al. (2021).
Figure 36 : Vue aérienne du projet de Galway Harbour 2040 (Source : Savills, Galway Harbour, 2021)
Finalement, le projet présente plusieurs espaces à grand déploiement, sans couvert ou écran solaire. Les travaux de Nice et al. (2022) permettent de démontrer que l’augmentation des températures de surface et la formation des ICU sont intimement liées à la largeur des rues et aux dimensions des espaces non couverts. Dans ce contexte, les grandes zones ouvertes sont plus susceptibles de provoquer un inconfort thermique pour les piétons, mettant ainsi à mal l'habitabilité du quartier. En revanche, la disposition et l’implantation des bâtiments respectent les critères d’une morphologie souhaitable d’après les principes de ventilation urbaine formulés par Santos et al. (2021).
Figure 37 : Exemple de résultat de modélisation des températures de surface selon différentes morphologies et compositions urbaines.
Rouge = Bâtiments. Vert = Végétation. Gris = Rues. (Source : Nice et al., 2022.)
En somme, bien que le projet Galway Harbour offre certains avantages quant à son habitabilité, son confort climatique potentiel n'est pas maximisé. Une connectivité des espaces verts, une disposition plus compacte des éléments de couvert, particulièrement aux bords de mer, ainsi qu’une alternance, et non une division, des surfaces perméables et imperméables auraient notamment permis au Port de Galway d’offrir de meilleures conditions thermiques aux habitants.
Conclusion
Figure 38 : Vue à hauteur piétonne du projet de Galway Harbour 2040 (Source : Scott Talon Walker Architects, 2023)
Le projet à l’étude, Galway Harbour, consiste en la requalification de la zone du portuaire de la ville de Galway, sur la côte ouest de l’Irlande. Le projet s’inscrit dans une stratégie globale du pays, le Project Ireland 2040, pour faire face aux conséquences inévitables des changements climatiques et aux pressions sociales sur les villes dans les prochaines décennies. Les enjeux auxquels doit répondre le projet sont notamment la montée des eaux et la vulnérabilité face aux inondations, les problèmes d’habitabilité liés aux îlots de chaleur urbains et l’importante croissance démographique prévue dans les prochaines années. Pour faire face à ses enjeux, le projet Galway Harbour présente des stratégies reposant sur des intentions sociales et écologiques, comprenant notamment la réintroduction de la biodiversité, la création d’un nouveau quartier urbain mixte et la gestion des inondations.
Le cadre théorique établi afin de réaliser le projet avait donc pour but d’établir des critères d’évaluations du projet urbain basés sur des concepts reflétant la nature complémentaire et interdépendante des dimensions sociales, techniques et écologiques de la résilience urbaine, comme base de la création d’un environnement socio-écologique. Le but de la présente étude n’était certainement pas de fournir une description élogieuse du projet Galway Harbour, mais bien de définir un cadre d’analyse rigoureuse et critique permettant un regard impartial sur les qualités et défauts du projet dans une optique de résilience aux changements climatiques, qui peut informer une variété de projets et d’aménagements à l’échelle mondiale. Les concepts choisis, soit l’équité urbaine, le design microclimatique urbain et le water sensitive urban design, permettent donc un regard informé sur les différentes dimensions précédemment abordées. Les critères de la résilience urbaine établis dans le cadre théorique étaient ensuite liés à des critères généraux du design urbain établis par Bentley et al, dans le but de brosser un portrait complet du projet du port de Galway.
À la lumière de l’analyse du projet, certains constats relatifs à la qualité des espaces urbains et à leur adaptation aux changements climatiques peuvent être faits. Dans l’ensemble, le projet démontre une forte intention de satisfaire aux critères nécessaires à la résilience urbaine. De manière générale, la perméabilité et la variété s’imposent comme principes forts de la proposition et sont reflétées dans l’aménagement proposé. Plusieurs options de déplacements actifs sont offertes dans le projet, et une forte concentration de bâtiment présente une mixité d’usage, permettant une activité constante. Cependant, à certains endroits, les parcours de la trame urbaine et la forme des bâtiments nuisent quelque peu à la perméabilité visuelle, et certaines stratégies d’implantation nuisent à l’interface de perméabilité entre l’espace public et l’espace privé. Par ailleurs, certains principes de la variété, notamment concernant les modes de tenure et les types de logements, sont difficilement évaluables en raison du manque d’information. Ces principes de mixité sociale sont élémentaires à l’équité urbaine, et conséquemment à la résilience urbaine aux changements climatiques.
En termes de lisibilité, le projet du port de Galway représente une amélioration notable sur la situation actuelle. La majorité des éléments pouvant donner une lisibilité accrue au quartier sont adressés par la proposition d’aménagement, alors que des repères et des voies facilement distinguables sont présents. La hiérarchisation morphologique participe également à la distinction de certains espaces dans le quartier. Tout comme les points précédemment abordés, l’avancement actuel de la proposition laissent certains points en suspend dans l’analyse de la lisibilité, notamment en ce qui concerne la facture architecturale du quartier et ses limites. Au cœur du projet, l’eau est à la fois un élément accentuant la lisibilité du projet, et un facteur clé des WSUD.
Au niveau des stratégies de remédiations aux inondations, l’examen du projet du Galway Harbour révèle une lacune dans l’information disponible pour juger du water sensitive Urban Design (WSUD). Bien que les documents disponibles mettent en avant-plan des stratégies esthétiques et efficaces liées au design urbain, les documents graphiques présentés se concentrent davantage sur la vulgarisation que sur la démonstration desdites stratégies. L'absence d’explications sur la mise en œuvre approfondie du WSUD est donc essentielle à la lisibilité du projet. La présentation du projet composte tout de même certaines stratégies de WSUD, mais ces dernières restent vagues et incomplètes. Plusieurs stratégies de WSUD pourraient par ailleurs être bénéfiques à la lisibilité du projet. Par exemple, l'utilisation de terrains de sports transformables en bassins de rétention offrirait une lisibilité spécifique et évolutive, tout en renforçant la résilience aux inondations.
La proposition de réaménagement du Port de Galway démontre par ailleurs une robustesse notable dans la polyvalence de son espace public, favorisant des interactions ouvertes et une adaptation aux températures en hausse. Cependant, l'approche généralisée du projet crée un paysage homogène qui limite la singularité des espaces publics. Bien que robuste selon la vision de Bentley, le projet présente une faible pluralité d’options, limitant ainsi la capacité de résilience face aux conséquences d’augmentation de température des changements climatiques. Bien que la présence d’arbres sur certaines voies de circulation permette une protection contre les îlots de chaleurs, la faible interconnectivité des espaces verts et la démarcation franche entre les surfaces perméables et imperméables nuisent au potentiel de confort thermique du projet.
En somme, le projet Galway Harbour, par ses composantes sociales, techniques et écologiques, a pour objectif la création d’un environnement socio-écologique conforme aux critères de la résilience urbaine. L’étude démontre cependant que les intentions avancées par les administrateurs du projet manquent de recherche et de planification, et l’aménagement proposé, malgré ses qualités, pourrait être amélioré à plusieurs égards dans une optique de résilience urbaine. Tel que mentionné en introduction, ce projet est cependant en cours de développement, et est certainement voué à des mutations au cours des prochaines années. Nous espérons que le présent travail ne soit pas interprété comme une condamnation du développement du port de Galway, mais bien comme base d’une réflexion critique sur la manière d’améliorer de projet dans son développement, et qu’il puisse également servir de base d’analyse et de bonification de divers projets urbains à l’échelle mondiale.
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